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Les républicains du Sénégal sont doublement victimes


Les sénégalais sont victimes, d’une part, des manifestations violentes qui ont causé la perte tragique de vies humaines et des dommages considérables aux biens publics et privés, et d’autre part, d’une loi d’amnistie proposée pour effacer ces faits terroristes et pire encore, avant même que les présumés auteurs ne soient traduits devant les cours et tribunaux de la république.
Face à cette situation, je ne saurais me taire. Il est essentiel de comprendre que l’adoption de la loi d’amnistie ne peut en aucun cas effacer les souffrances endurées par les victimes des violences et des pillages et par les familles ayant perdu leurs proches pour toujours. Elle ne peut non plus justifier l’impunité des responsables de ces actes odieux.
Il est troublant de constater que cette loi d’amnistie semble viser à blanchir ceux qui ont délibérément semé le chaos et la terreur dans notre cher Sénégal. En acceptant une telle mesure, nous risquons de renforcer la défiance envers nos institutions et d’affaiblir davantage l’autorité judiciaire.
Pour comprendre les conséquences de l’adoption de la loi d’amnistie initiée par le président de la République et portée par ses députés, comme il l’a prôné lors du dernier dialogue national, revenons au discours du président tenu le 3 juillet 2023 Il déclarait que « […]. Pour certains de nos concitoyens […], la fête s’est déroulée dans l’ombre du deuil, parce que leurs chers enfants faisaient partie de ceux et celles qui ont perdu la vie dans des violences insoutenables, injustifiables et inexcusables. Des violences qui ont mis à l’épreuve notre cohésion sociale et notre longue et enviable tradition de paix et de stabilité en Afrique. […] Aucun de nos fils, aucune de nos filles, ne doit payer de sa vie les désaccords qui s’expriment dans nos sociétés. La vie de nos concitoyens ne peut être sacrifiée sous l’autel d’intérêts politiques. Nous avons l’obligation de protéger la vie et la dignité de tous les sénégalais, de toutes les sénégalaises. […]. Nous avons vécu des événements particulièrement graves, marqués par une violence sans précédent, occasionnant des morts et des blessés, ainsi que la destruction massive de biens publics et privés. Les scènes de violences et de pillages auxquelles nous avons assisté et leur coïncidence avec une cyber attaque contre des sites stratégiques du Gouvernement et des services vitaux, tels que l’eau et l’électricité, n’ont rien à voir avec une quelconque manifestation politique. Rien, ni aucune revendication ne saurait justifier qu’on tue, qu’on diffuse des messages de haine et de violence dans les réseaux sociaux, qu’on saccage et brûle des biens publics et privés, y compris des moyens de transport, des commerces, des lieux de culte, des domiciles, des Consulats, des ambulances –même un corbillard- , des universités et des écoles comme pour éteindre la lumière du savoir, réduire au silence notre élite et notre relève scientifiques et intellectuelles et plonger notre pays dans les ténèbres de l’obscurantisme. L’objectif funeste des instigateurs, auteurs et complices de cette violence inouïe était clair : semer la terreur, mettre notre pays à l’arrêt et le déstabiliser. C’est un véritable crime organisé contre la nation sénégalaise, contre l’État, contre la République et ses Institutions. […]. Je redis avec fermeté que les auteurs, les commanditaires, les complices répondront de leurs actes inqualifiables devant la justice. En attendant, les enquêtes se poursuivent. Nous ferons toute la lumière sur ces événements et sur les forces occultes qui veulent ébranler notre pays. Pour ma part, j’affirme ici que je ne transigerai pas avec des fossoyeurs de la nation, de l’État, de la République. Ce serait trahir mon serment constitutionnel. »
Pourtant, Monsieur le président de la république, la loi d’amnistie, qui sera certainement votée à l’Assemblée nationale, vise à effacer complétement l’existence de ces graves faits criminels pour ne pas dire terroristes et donc de remettre dans la société de potentiels terroristes. En effet, ladite loi « entraîne, sans qu’elle ne puisse jamais donner lieu à restitution, la remise totale de toutes les peines principales, accessoires et complémentaires, ainsi que la disparition de toutes les déchéances, exclusions, incapacités et privations de droits attachées à la peine », ceci sur « tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d’infraction criminelle ou correctionnelle, commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, tant au Sénégal qu’à l’étranger, se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques, y compris celles faites par tous supports de communication, que leurs auteurs aient été jugés ou non ».
Adopter cette loi revient donc à nier l’existence au Sénégal des manifestations violentes qui ont entraîné la perte tragique de vies humaines et des dommages considérables aux biens publics et privés. Plus précisément, un père n’a pas vu ses deux filles carbonisées dans un bus Tata, des mères et pères de familles n’ont pas perdu leurs enfants à qui ils portaient leurs espoirs. L’université Cheikh Anta Diop n’a pas été brûlée et fermée pendant plusieurs mois. Un membre du GIGN n’a pas non plus perdu sa main. Les supermarchés Auchan n’ont pas été vandalisés, les stations Total n’ont pas été brûlées, la maison d’un avocat n’a pas été incendiée. Des manifestants n’ont pas été lâchement abattus, des centaines de compatriotes n’ont pas été emprisonnés pendant plusieurs mois dans des prisons surpeuplées, des forces de défense et de sécurité ne n’ont pas été accusées de nervis, des juges n’ont pas été accusés de dépendance, etc. En résumé, l’essentiel de l’histoire du Sénégal entre février 2021 et février 2024, sera simplement occulté.
Bien que présentée comme une mesure de réconciliation nationale, la loi d’amnistie soulève de sérieuses inquiétudes quant à son impact sur la primauté du droit et sur la quête de vérité et de justice dans notre société. En effet, elle accorde simplement une impunité à des individus ayant potentiellement commis des actes présumés répréhensibles, ce qui va à l’encontre des principes fondamentaux de la justice et de la responsabilité individuelle. En outre, l’adoption d’une telle loi risque de compromettre la confiance des citoyens dans les institutions démocratiques et dans l’État de droit. Elle pourrait également entraver la capacité de notre société à tirer les leçons du passé et à progresser vers un avenir fondé sur le respect des droits humains et la lutte contre l’impunité.
Non, monsieur le président, nous refusons d’être amnésiques.
                                           Citoyen et républicain de son État,
                                           Docteur en sciences économiques et statisticien économiste de la santé.

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